Tomáš Netopil, qui dirige la Philharmonie Tchèque lundi soir, s’est prêté pour nous au jeu des questions-réponses.

Jiří Bělohlávek devait diriger la tournée de la Philharmonie Tchèque, la vie en a décidé autrement puisque l’immense chef tchèque est décédé récemment. Il revient à Tomáš Netopil, tchèque lui aussi, l’honneur et la responsabilité de le remplacer à la tête d’un des orchestres les plus prestigieux de la planète. Depuis l’automne 2013, il est le directeur musical du Théâtre Aalto et de la Philharmonie d’Essen. Sa carrière s’est aussi enrichie au gré de nombreux engagements dans des théâtres lyriques d’importance, comme la Deutsche Oper Berlin, l’Opéra de Munich, l’Opéra de Paris, l’Opéra des Flandres, le Théâtre de la Fenice ou le Théâtre San Carlo de Naples. Il entretient également une étroite collaboration avec l’Opéra de Vienne. Dans le registre symphonique, Netopil s’est notamment distingué à la tête de l’Orchestre Philharmonique Tchèque, l’Orchestre de Paris, l’Orchestre Philharmonique de Londres, l’Orchestre Symphonique de Prague et maintes grandes phalanges allemandes, dont l’Orchestre Philharmonique de Berlin et l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig. En Suisse, Tomáš Netopil a déjà fait ses débuts à la tête des deux principales phalanges du pays, l’Orchestre de la Tonhalle de Zurich et l’Orchestre de la Suisse Romande. Il a eu la gentillesse de répondre à quelques unes de nos questions.

Vous êtes lauréat du Concours de direction Georg Solti à Francfort en 2002 et vous dirigez de nombreux orchestres prestigieux depuis vos débuts: diriger un orchestre est quelque chose que vous avez toujours voulu faire et quel est votre premier souvenir comme chef?

Tout a commencé à l’école quand je dirigeais un petit orchestre de chambre. Mon premier grand souvenir comme chef d’orchestre reste toutefois celui d’un concert lors duquel je dirigeais un orchestre symphonique, mais cela fait déjà partie d’un passé lointain. Enfant, j’ai d’abord voulu être violoniste. J’ai donc fait des études dans cette voie. Puis j’ai énormément apprécié faire de la musique de chambre et jouer dans un orchestre de chambre. Étant donné que je dirigeais toujours les autres (comme premier violon) dans ces divers ensembles, que j’aimais parler de musique et partager mes réflexions sur la musique avec les autres, je me suis dit que ce serait bien d’essayer de m’engager dans une carrière de chef d’orchestre. J’ai donc commencé à faire des études pour y parvenir.

Vous avez occupé le poste de directeur musical au Théâtre National de Prague de 2009 à 2012. Vous dirigez à présent la Philharmonie Tchèque depuis le décès de Jiří Bělohlávek. Est-ce que cela a été difficile de suivre ses pas?

J’ai pris en charge quelques-uns de ses projets. Il était mon professeur et mon mentor, je l’admirais beaucoup en tant que musicien. Sa disparition a été un choc pour tous ceux qui avaient à faire à lui. Son décès m’a attristé, mais je me sens privilégié de pouvoir me charger  – en faisant du mieux que je peux – de certains de ses projets et de les mener à bien. C’est en quelque sorte lui rendre hommage par ce biais.

La Philharmonie Tchèque a quelque chose d’un trésor national. Comment travaille-t-on avec un tel orchestre, est-ce différent qu’avec un autre orchestre?

Oui, c’est quelque chose de différent. La Philharmonie Tchèque a un son spécial, un son chaud et la composition de l’orchestre change beaucoup, parce qu’il y a de nombreux jeunes musiciens qui en font partie. Ces jeunes ont envie de se donner à fond et l’atmosphère dans l’orchestre est très conviviale. J’ai toujours beaucoup de plaisir à travailler avec eux. J’ai mon bureau ici à Essen et pour moi, ce sont toujours des moments spéciaux et précieux de pouvoir retourner à Prague et travailler avec la Philharmonie Tchèque.

Vous allez diriger des œuvres des deux compositeurs tchèques Dvořák et Janáček (vous avez d’ailleurs enregistré Jenůfa avec le Prague Radio Symphony Orchestra). En tant que Tchèque, avez-vous un attachement particulier à ces compositeurs?

Oui, j’ai toujours ressenti un lien émotionnel très fort avec eux, en particulier avec Dvořák, c’est clair. Une musique splendide et spéciale à mes yeux. Janáček a toujours représenté un défi pour moi. A l’étranger, il est célèbre pour ses opéras, mais entendre ses œuvres orchestrales dans un concert symphonique est une expérience remarquable et je suis heureux que nous ayons pu ajouter l’ouverture de l’opéra Jenůfa au programme du concert qui sera donné à La Chaux-de-Fonds. La musique de Janáček est très émotionnelle, dans le sens dramatique de sa musique et dans son vocabulaire musical.

Vos deux CD de musique symphonique de Janáček parus chez Supraphon ont été choisis comme “Editors choice of the month” par le magazine Gramophone. Vous dirigez de nombreux opéras et de nombreuses premières. Quels sont vos futurs projets, tant pour les concerts que pour les CD, au cours de la saison à venir?

Il y a une tournée anglaise avec soliste prévue avec la Philharmonie Tchèque dans quelques mois. J’ai bien sûr aussi mes propres projets de concerts et de productions d’opéras ici à Essen. Je vais diriger dans quelques jours la première de l’opéra comique La Fiancée vendue de Smetana, puis en mars 2018 la première du drame musical Salomé de Strauss. J’aurai également une nouvelle production à l’Opéra national de Vienne, Der Freischütz. Et je vais diriger divers orchestres comme chef invité. J’aurai de quoi faire ! En ce qui concerne les CD, je vais sortir un nouvel album chez Supraphon en novembre avec de la musique de Martinů, Bouquet de fleurs, enregistré par la Philharmonie Tchèque il y a quinze ans. C’est une cantate extraordinaire et je suis très fier de cet album.

Propos recueillis par la Société de Musique de La Chaux-de-Fonds

Scroll to top