« Ardon gl’incensi – Spargi d’amaro pianto » – l’air de la folie dans Lucia di Lammermoor

« En dix ans, Regula Mühlemann a accompli une ascension fulgurante, côtoyant sur scène des illustres collègues comme Cecilia Bartoli ou Joyce DiDonato, engagée dans les grandes maisons d’opéra et les festivals internationaux. Longtemps cantonnée dans le répertoire mozartien, elle se destine à endosser des rôles dans le bel canto romantique. »

« Pureté de l’instrument vocal, sincérité de l’engagement, silhouette d’une beauté classique participent au succès de la soprano lucernoise »

« Bref, tout va pour le mieux pour cette cantatrice qui trouve à peine le temps de poser ses bagages chez elle, engagée dans des productions d’opéra, des opéras en versions concertantes ou des concerts isolés, à Londres, Paris, Barcelone, Vienne et Berlin. »

Le Temps, Julian Sykes

« Elle rêve de chanter Lucia di Lammermoor » … ce sera le cas le vendredi 7 février à 19h30 avec l’air de la folie « Ardon gl’incensi – Spargi d’amaro pianto ». Regula Mühlemann réalisera ainsi son rêve

À vivre dans l’acoustique légendaire de la Salle de musique de La Chaux-de-Fond avec Michele Spotti au pupitre.

Lucia occupe une place à part dans l’œuvre pléthorique de Donizetti : seul titre à s’être constamment maintenu au répertoire avec L’elisir d’amore et, en France, La Fille du régiment, ce fut aussi l’un des plus grands succès que connut le compositeur de son vivant. En quelques années, Lucia di Lammermoor deviendra le parangon de l’opéra romantique italien, mais aussi tout simplement l’un des titres les plus célèbres de tout le répertoire lyrique. En 1857, vingt ans exactement après la création française de l’ouvrage, lorsqu’Emma Bovary se rend à l’Opéra, c’est à Lucia di Lammermoor qu’elle assiste. Cent quarante ans plus tard, Luc Besson utilise la musique de folie de Lucia dans Le Cinquième Élément, musique que s’appropriera à son tour, quelques années plus tard le chanteur pop russe Vitas.

Acte III

Enrico provoque Edgardo en duel : les deux hommes doivent se retrouver le lendemain près des tombeaux des Ravenswood.

Pendant ce temps sont célébrées les noces de Lucia et d’Arturo, mais elles sont brutalement interrompues par l’arrivée de la mariée, l’air égaré, les mains couvertes de sang : Lucia a perdu la raison et, dans un accès de démence, a poignardé l’homme qu’on l’a forcée à épouser… Elle chante sa folie dans une longue et difficile scène (« Il doce suono » – « Ardon gli incensi ») devant les invités horrifiés, puis annonce sa mort prochaine : « Spargi d’amaro pianto ».

La folie de Lucie dans le roman de Walter Scott :

Arrivé à la porte de la chambre, le colonel y frappa, appela sa sœur et Bucklaw, et ne reçut d’autre réponse qu’un faible et long gémissement. Il n’hésita plus à ouvrir la porte, mais quelque chose opposait un obstacle qui céda pourtant facilement au premier effort que fit le colonel pour la pousser. On entra dans l’appartement, et la première chose qu’on aperçut fut le corps de Bucklaw, étendu par terre derrière la porte, et nageant dans son sang. Tous poussèrent à l’instant un cri de surprise et d’horreur qui fut entendu dans le salon, et toute la compagnie, concevant de nouvelles alarmes, se précipita vers l’appartement d’où venait ce bruit.

– Elle l’a tué ! dit tout bas à sa mère le colonel Ashton. Cherchez-la.

Et, tirant son épée, il sortit de la chambre, se mit à la porte, et jura que personne n’y entrerait que le ministre et un chirurgien qui se trouvait au château. Bucklaw respirait encore ; on s’empressa de le relever, on le transporta dans un autre appartement, où ses amis le suivirent afin de connaître plus tôt ce que le chirurgien penserait de ses blessures.

Cependant sir William, lady Ashton et les deux parents qui les avaient suivis n’avaient pas trouvé Lucie dans le lit nuptial ni dans la chambre. Comme il n’y existait d’autre porte que celle par laquelle ils étaient entrés, et qu’ils avaient trouvée fermée, ils commencèrent à craindre qu’elle ne se fût jetée par la fenêtre, quand l’un d’eux, faisant des yeux une revue plus attentive de l’appartement, découvrit quelque chose de blanc dans le coin d’une grande cheminée. C’était la malheureuse fille qui était accroupie, ou plutôt blottie dans les cendres. Ses cheveux étaient épars, ses vêtements déchirés et souillés de sang, ses yeux brillaient d’un éclat terne et les convulsions de la démence agitaient ses traits. Quand elle se vit découverte, elle grinça des dents, tendit ses mains ensanglantées avec les gestes frénétiques d’un démoniaque.

On fut obligé d’appeler quelques servantes, car ce ne fut qu’en recourant à la force qu’on put la tirer de la retraite qu’elle avait choisie. Elle n’avait pas jusqu’alors prononcé une seule parole distinctement articulée, et ce ne fut que dans le moment où on la transportait hors de cette chambre qu’elle s’écria avec une espèce de joie sinistre : – Vous avez donc emmené votre beau fiancé ? – On la déposa dans un autre appartement, où plusieurs femmes la suivirent pour veiller sur elle et lui donner les soins que sa situation exigeait.

Walter Scott, La Fiancée de Lammermoor, chapitre XXXIV

Source: notamment premiereloge-opera.com

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