Nous fêtons aujourd’hui les 125 ans d’existence de la Société de Musique de La Chaux-de-Fonds et cette plaquette retrace les dernières années de cette longue aventure. C’est un grand honneur que de présider aux destinées d’une telle tradition. La ville de La Chaux-de-Fonds a développé ses lieux d’arts avant d’avoir accès à l’eau courante. Cela montre bien le besoin de la population de se nourrir de ce qui caractérise l’être humain : son désir de stimulation intellectuelle et de culture. La musique en fait partie et c’est bien naturellement que le besoin de créer une Société de musique s’est fait sentir, au moment où la ville connaissait un essor économique sans précédent.
L’existence de cette même Société de musique aujourd’hui, association culturelle non institutionnelle, relève plus du défi. Elle marque l’attachement d’une population à sa singularité. En effet, aucune autre ville de moins de cinquante mille habitants, même à la petite échelle de la Suisse, ne peut se targuer de proposer autant de concerts de niveau international à ses concitoyens depuis tant d’années.
Si l’éloignement des grands centres et la présence d’élites cultivées ont concouru au développement de cette offre culturelle d’exception dans les montagnes neuchâteloises, la réalité d’aujourd’hui est bien différente. L’offre culturelle est très variée, la mobilité des gens s’est accrue et les habitudes de consommation ont changé. Même si la musique dite classique représente toujours un vecteur culturel majeur, maintenir, saison après saison, un haut niveau artistique dans notre Salle de musique représente une activité qui n’a plus rien à voir avec l’organisation d’un simple concert. Pour exister, il faut se faire connaître, dans la presse écrite, à la radio, à la télévision, sur internet et sur les réseaux sociaux. Il faut coordonner l’organisation d’un concert avec la sortie d’un disque. Il faut enfin profiter de l’actualité d’un artiste pour retenir l’attention du public.
Bien que nous puissions toujours compter sur un public régional de connaisseurs, nous devons aussi élargir notre horizon. Si Lausanne, Genève, Berne et Zurich se sont rapprochées de La Chaux-de-Fonds, La Chaux-de-Fonds doit aussi se rapprocher des principales villes de Suisse. Attirer un public aussi large que possible à nos concerts est la clé de notre succès futur.
Notre raison d’être est de proposer à une région une activité qui rassemble, une activité qui élève, une activité qui réjouit. La musique classique est une forme de culture élitaire, même si bien des organisateurs de concerts s’en défendent. Entrer dans une salle de musique représente un effort pour certains. Mais des efforts importants sont aussi consentis pour attirer dans notre salle un public jeune, ouvert et parfois surpris. Ce sont nos spectateurs de demain et même si la diversité culturelle qui caractérise notre jeunesse pourrait laisser penser que la musique classique, après un développement extraordinaire au XXe siècle, va être reléguée au rang de folklore, je reste convaincu que cette forme d’art va continuer de se développer.
La musique classique est le reflet de l’âme et de nos émotions, certes comme toute forme d’art, mais qui touche l’intime par les vecteurs mêmes qu’elle utilise. Le monde s’accélère, la technologie permettra bientôt de se déplacer virtuellement. Des ordinateurs composent aujourd’hui de la musique après en avoir été les instruments. Alors que penser d’une musique qui se joue sur des instruments inventés il y a au minimum 150 ans, sans amplification, avec des auditeurs attentifs et concentrés ? Qu’elle est humaine, justement.
Arthur Rubinstein disait que lorsqu’il jouait Chopin, il savait qu’il parlait directement au cœur des gens. Longue vie à la Société de Musique.
Olivier Linder, président
Vous pouvez télécharger la plaquette ici